Dans les programmes scolaires, une liste resserrée de femmes impose désormais des points de passage obligés des cours d’histoire-géographie au collège et au lycée. Mais ces grandes figures triées sur le volet et au prix de raccourcis réducteurs posent problème. Un exemple concret : Louise Michel.
En 2000, l’historienne pionnière Michelle Perrot était nommée au Conseil national des programmes, et pourtant… il faudra attendre pas loin de deux décennies pour que les femmes soient enfin affichées par l’éducation nationale comme des entrées à part entière dans les programmes scolaires du second degré, au collège et au lycée. 2000, c’est aussi l’année où a vu le jour une association d’historiennes (et aussi quelques historiens) appelée Mnémosyne du nom de la déesse de la mémoire. Mnémosyne, qui repose sur le bénévolat et l’énergie de ses membres, s’est donnée pour but de promouvoir l’histoire des femmes et l’histoire du genre en France – aussi bien auprès du grand public, qu’au sein même de la discipline, où les résistances ont durablement été nombreuses, pour faire entrer les femmes dans l’histoire en tant qu’actrices dignes d’être étudiées. Alors même que les travaux pionniers en histoire des femmes, puis en histoire du genre et en histoire du féminisme, remontent maintenant aux années 1970, à l’époque où un petit groupe de pionnières poussaient les frontières de leur discipline depuis un séminaire organisé à l’université Jussieu, à Paris.
Vingt ans ont passé depuis la création de Mnémosyne, à laquelle est adossée la revue CLIO, à l’apport considérable pour combler bien des angles morts de l’historiographie, et pourtant l’histoire telle qu’elle s’enseigne à l’école reste souvent hermétique à des décennies d’avancées historiographiques. Loin de s’être actualisé, le savoir tel qu’il avait percolé jusque dans les manuels scolaires a même semblé longtemps réfractaire pour poser les questions sous un angle mixte, comme le note par exemple Véronique Garrigues, enseignante en histoire-géographie, qui milite de longue date à Mnémosyne : “Les éditeurs placent en couverture des femmes parce qu’apparemment ça fait mieux vendre, et mettent des documents illustrés dans leurs manuels, où l’on voit des femmes… mais sans poser une seule question sur les femmes, ou sur les rapports de genre. Alors qu’on constate une demande sociale très forte, y compris chez nos élèves qui sont contents – et pas seulement les filles – de découvrir que les femmes sont aussi actrices de l’histoire, les programmes scolaires sont à la traîne.”