Les fondements éthiques du féminisme : réflexions à partir du contexte africain par Fifamè Fidèle Houssou Gandonou
Par-delà les excès et autres dérapages qui l’ont parfois défiguré, le féminisme, comme discours et comme pratique militante, n’est qu’une variante du combat contre l’inégalité. L’objet de cette thèse est de mon- trer comment l’éthique universelle, avec son exigence de dignité pour tous, est au cœur du féminisme, dont elle est la meilleure clé de compré- hension.
La première partie du travail évoque la condition féminine en Afrique, en s’appuyant sur trois œuvres de la littérature féminine fran- cophone : La parole aux négresses d’Awa THIAM, Une si longue lettre de Mariama BÂ et Que vivent les femmes d’Afrique ? de Tanella BONI. Elle montre que, par-delà les préjugés des hommes sur le sexe dit faible, le malheur des femmes est, qu’elles ont elles-mêmes appris, au cours des siècles, à se voir comme les hommes les perçoivent, intériorisant ainsi les valeurs et contre-valeurs de la société patriarcale.
Sous le titre : « Le féminisme comme réponse », la deuxième partie évoque l’histoire, l’évolution et les diverses formes du féminisme dans le monde. Commentant les classifications les plus connues et la diversité des traditions existantes, elle montre comment les formes d’expression multiples du féminisme restent unies par une même préoccupation, celle d’une émancipation de la femme. Elle montre par ailleurs, en s’appuyant sur un ouvrage collectif paru d’abord sous le titre anglais Engendering African Social Sciences, comment l’approche « genre » s’est progressi- vement imposée et continue de s’imposer dans les sciences sociales en Afrique. Elle montre en outre comment s’impose progressivement sur le terrain, une nouvelle conception des rapports hommes/femmes, illustrée au Bénin par le vote récent d’un nouveau Code de la famille. Toutefois,
malgré ces avancées notoires, l’écart reste considérable entre la théorie et la pratique, entre les nouvelles réglementations et la réalité qui per- siste, sur le terrain, dans les rapports sociaux entre les sexes. La thèse analyse au passage les causes de ce décalage.
La troisième partie a pour titre: «Le féminisme, une question éthique et théologique ». Elle évoque la genèse et le développement d’une théologie féministe en rupture avec l’androcentrisme dominant dans les études religieuses. L’histoire de cette révolution intellectuelle remonte à la fin du XIXème siècle en Amérique avec, notamment, la publication de The Woman’s Bible. Elle n’a cessé de se renforcer pen- dant tout le XXème siècle et jusqu’à ce jour, où elle a essaimé vers l’Europe, et plus récemment vers l’Afrique. La thèse analyse les déve- loppements d’un questionnement théologique spécifiquement africain, depuis la publication en 1956 de l’ouvrage collectif Des prêtres noirs s’interrogent jusqu’à la création en 1976 de l’Association œcuménique des théologiens du tiers-monde (EATWOT), puis en son sein, en 1977, de l’Association œcuménique des théologiens africains (AOTA), et plus récemment, du Cercle des théologiennes africaines engagées. La thèse examine au passage l’influence du Cercle sur la théologie protestante au Bénin.