Paroles et représentations : récits de prostitution migrante et le « féminisme pute » – Mémoire de Master 2 de Shisleni de Oliveira-Macedo (Paris 8)
Malgré le fait que l’on puisse observer des changements sociaux remarquables tout au long du XXe siècle en ce que concerne la sexualité et la place des femmes dans les sociétés occidentales, l’échange de services sexuels contre rémunération continue d’être considéré par le sens commun comme quelque chose de dégradant, d’indigne, sinon de sale ou de violent. Et ces connotations péjoratives s’adressent bien plus particulièrement à un des partenaires possibles de cet échange : les femmes ; en montrant un système de domination d’un genre sur les autres, qui s’appuie sur la répression, la violence, le stigmate et la criminalisation.
Le débat sur la prostitution est source de polémique et de discussions tendues aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des théories féministes. D’un côté, parmi les critiques, il y a les arguments qui dénoncent la violence faite aux femmes comme inhérentes à la pratique de prostitution. D’un autre côté, il y aurait ceux qui vont, au contraire, vers une proposition de professionnalisation, revendiquant un besoin de banalisation du métier de la prostituée, sur la base du libre choix sur son propre corps. Entre ces deux argumentaires opposés, nous pouvons retrouver une panoplie complexe et diversifiée d’argumentations.
Marie-Elisabeth Handman et de Janine Mossuz-Lavau (2005) affirment qu’il est impossible de penser la prostitution sinon comme un phénomène pluriel, tellement les contextes, les rapports et les situations peuvent être diverses. Cela ne reviendrait pas à nier la possibilité que les arguments extrêmes que j’ai mentionnés puissent se baser sur une réalité : chacune de ces positions pourrait en effet trouver une légitimité dans certains contextes. Plus précisément, des facteurs comme la race, la classe, l’origine et la sexualité vont jouer des rôles déterminants dans l’entrée et dans les conditions d’exercice de cette activité et sur les niveaux de marginalisation.