Note de lecture sur « Coline Cardi & Geneviève Pruvost (dir.), Penser la violence des femmes (La Découverte, 2012) », Les Cahiers du genre, n°54, 2013
Sur la couverture du livre, qui fit beaucoup parler lors de sa sortie, on découvre le photo-montage, sur fond mauve et fleuri, d’un corps de femme blanche, armée jusqu’aux dents, dont le visage a été remplacé par une tête de Barbie coiffée d’un diadème. Cette image, à première vue réjouissante, devient cauchemardesque quand on la regarde de plus près. La peau du bras gauche, qui tient une énorme mitraillette, est noire ; ce bras semble d’ailleurs totalement détaché de l’épaule, blanche et tatouée, elle-même posée de travers sur le torse. On réalise alors que ce corps monstrueux, à l’anatomie impossible, est composé de différents morceaux de femmes et du visage inexpressif et souriant d’une poupée. La séduction cocasse sus-citée d’abord par cette « Barbie kalachnikov » laisse donc rapidement place à un profond malaise.
Or c’est précisément à cette impression que s’attaque le livre – à ce malaise, suscité par la question de la violence (physique, symbolique, sexuelle, légale ou non, etc.) lorsqu’elle est exercée par les femmes, dont le genre est, précisément, socialement construit comme non violent. Coline Cardi et Geneviève Pruvost relèvent d’ailleurs le paradoxe de cette violence féminine qui est soit niée, soit hypertrophiée : dans les deux cas, il s’agit bien évidemment de « reproduire la différence des sexes » (p. 19).