L’histoire derrière tous ces étranges tableaux qui montrent une jeune femme allaiter un vieillard.
La scène est célèbre, elle a traversé les époques, de l’Antiquité à nos jours, avec une belle prolifération de représentations à l’époque baroque. Elle a inspiré nombre de peintres, qu’il s’agisse d’anonymes de Pompéi ou de grands noms tels que Pierre Paul Rubens ou le Caravage. Les styles varient, les couleurs et les traits des visages aussi, mais l’idée demeure : on y voit une jeune femme sortir un sein afin d’allaiter un vieillard.
À l’instar d’œuvres qui narrent des scènes de la Bible (telles que les représentations de Judith décapitant Holopherne ou de Suzanne et les Vieillards, entre nombreux autres exemples) ou relatent des faits historiques (couronnements, célèbres batailles ou décès), ces exemples de charités romaines font office de métaphores. Elles s’inspirent d’une histoire pour en faire une scène exemplaire, ici un idéal de “piété filiale”, puisque la femme représentée, Péro, est la fille du vieillard, Cimon, qu’elle sauve de la famine grâce à son lait maternel. Oui, oui, c’est très incestueux.
Leur histoire est racontée par plusieurs auteurs antiques, tels que Valère Maxime, Pline l’Ancien ou Hygin, qui se l’empruntent, la font vivre et la mythifient à travers leurs récits. Peut-être inspirés par la légende de Junon allaitant Hercule, les écrivains content l’arrestation de Cimon, citoyen grec condamné à mourir de faim dans sa cellule. Seule sa fille est autorisée à lui rendre visite. Ses visites s’étendent sur plusieurs jours, ce qui étonne le geôlier, qui s’attend à voir le vieillard mourir plus rapidement, jusqu’à ce qu’il découvre que Péro aide le condamné à survivre en lui faisant boire son lait.