Maître Maria Vérone, « un destin féministe »

Née le 20 juin 1874 à Paris, Maria Vérone est la fille d’un chef comptable et d’une fleuriste. Homme de gauche, socialiste, son père l’initie aux milieux politiques dès l’adolescence. À 15 ans, elle est désignée secrétaire du Congrès de la Libre-Pensée française. D’abord institutrice, elle est aussi journaliste et avocate. C’est l’une des premières femmes inscrites au barreau de Paris. Son engagement pour les droits des femmes en fait l’une des pionnières du féminisme français.

Maria Vérone, un destin féministeest le titre du livre écrit par Jean-Louis Le Breton, son arrière-petit-fils, paru en 2021 aux éditions Panache. Il écrit dans sa préface : « Maria Vérone fut institutrice, chanteuse, publiciste, conférencière, avocate, militante féministe et exerça souvent plusieurs de ces activités en même temps. » Plus loin, il exprime sa colère après avoir retracé son histoire : « Colère parce que l’Histoire l’a occultée, oubliée, comme ce fut le cas des femmes en général dès lors qu’elles intégraient des domaines réservés aux hommes. Colère lorsqu’elle fut dénigrée et moquée par ses rivales ou sa cadette Louise Weiss. Colère contre moi-même pour n’avoir découvert que sur le tard cette aïeule combative si en avance sur son temps. »

Maria Vérone a grandi dans un milieu politisé. Son premier métier fut institutrice mais elle dut y renoncer – ou plutôt elle fut poussée vers la sortie – du fait de ses engagements. En 1900, le métier d’avocat est rendu accessible aux femmes. Elle s’inscrit à la faculté de droit en 1904. Durant ses études, elle devient aussi journaliste, « un vecteur idéal pour propager ses idées et une source de revenus ». Elle rejoint le journal La Fronde, créé par Marguerite Durand, en 1897, et entièrement réalisé par des femmes. Maria Vérone signe notamment des chroniques judiciaires sous le nom de « Thémis », la déesse de la justice. « Maria Vérone n’était pas croyante, mais sans doute a-t-elle vu là le symbole de ce qu’elle a toujours recherché : les mêmes droits et l’égalité pour tous », écrit Jean-Louis Le Breton*. Bien d’autres journaux lui ouvrent leurs pages. « Dans Le Droit des Femmeset dans L’Œuvreelle développe ses luttes féministes jusqu’à la fin de sa vie. » Dans La Fronde, elle répond à une lectrice en 1903 : « La femme forte est appelée à transformer la société, elle seule parviendra à donner l’élan aux timides, encore imbues des préjugés séculaires que l’homme espère, en vain, maintenir à son profit. »

Jean-Louis Le Breton écrit : « Si les premières causes défendues par Maria Vérone sont l’anticléricalisme et la Révolution sociale, le féminisme va bientôt devenir l’objet de toutes ses préoccupations. Marie Bonnevial, qu’elle a rencontrée aux réunions de la libre-pensée, l’invite à rejoindre la Ligue Française pour le Droit des Femmes (LFDF). » À l’époque, toujours mariée, Maria Vérone rencontre Georges Lhermitte, avocat et journaliste pour L’Aurore. Tous deux militants pour la Ligue internationale pour la défense du soldat, ils réalisent une grande tournée dans l’Est de la France à la fin de l’année 1904. « On peut supposer que ces quinze jours ont renforcé l’intimité de leur relation. Il est clair qu’ils partagent de nombreuses idées et passions communes : l’intérêt pour le droit, le journalisme, l’engagement militant. Ils font cause commune sur bien des sujets dont l’antimilitarisme et le droit des femmes. » Elle divorce de Maurice Giès après sept ans de mariage, en 1907. La même année, elle est inscrite au barreau de Paris et devient une pionnière de la profession. L’année suivante, elle épouse Georges Lhermitte, avec pour témoin Marie Bonnevial et Avril de Sainte-Croix.

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